Le blog de Pierre M. Thivolet, journaliste

Catégorie : Haute-Loire

Mais qu’est-ce qui ne va pas ( n’allait pas ?) avec Laurent Wauquiez

Et sur l’impétueux Wauquiez on relit l’enquête de Fabrice Veysseyre-Redon
Mettons de côté les idées politiques, les affinités partisanes, les sympathies électorales. 
Oublions un temps les petites phrases assassines, maladroites, mal à droite, très à droite, tellement à droite qu’on pouvait parfois se demander s’il y croyait vraiment ou s’il tentait de doubler Les Le Pen et consorts sur la droite. Alors que, on ne double jamais sur la droite, sauf en Grande-Bretagne. Mais on voit où ça les conduit, à Nigel Farage et au Brexit no deal qui va leur faire – et nous faire – très, très mal. 
Bouchons-nous le nez sur les boules puantes mal balancées. Ces fuites de son cours à l’EM Lyon où il dézinguait ennemis et amis à tout va…pas très habile. 
En dehors de tout ça, même si ça fait beaucoup, qu’est-ce qui ne va pas avec Laurent Wauquiez ? Pourquoi est-il si peu populaire ? Pourquoi n’imprime-t-il pas ? Il a la carrure physique d’un Chirac, une allure de gendre idéal, une tête bien pleine, normale Sup, l’ENA, il aime Houellebecq, il a un ancrage local : 
La Haute-Loire où il a su se faire adopter par feu Jacques Barrot, qui découvrit mais trop tard que son poulain n’était ni chrétien-démocrate, ni pro-européen comme lui. 
Le Puy-en-Velay, une ville conquise sur la gauche, mais où tout le monde, même ses adversaires mis sur la touche et souvent brutalement, reconnaissent son dynamisme, sa bonne gestion. Puy de Lumières – copié sur Michel Noir à Lyon il y a 30 ans – qui met en lumières cette superbe ville entre puy de volcans et cathédrale, attire les touristes et redonne de la fierté à toute une région. 
Mais le succès en politique n’a rien à voir avec les qualités humaines ou intellectuelles. Sinon Donald Trump …
Si tout cela n’avait pas in fine de possibles conséquences sur notre vie démocratique, on pourrait rire de voir, comme dit-on ? le bal des faux culs depuis l’annonce de sa démission. 
Il y a d’abord ses « amis » et « alliés » républicains. Tous louent la dignité de son départ. Mais tous sont très emm… Car qui va s’y coller ? Remonter un parti comme les Républicains, voilà une tâche plus compliquée que capitaine de bateau de croisière à Venise. Venise où vous avez vu, on a frôlé la grosse catastrophe, gondoles contre paquebot, c’est le Paquebot qui finit dans les quais. Certains pourraient y voir une allégorie du naufrage de la droite et pas seulement qu’en France, mais en Italie, en Espagne etc…
Et puis il y a les rapaces, les voraces, les hyènes qui se ruent sur le cadavre encore chaud, en se disant : Il y encore de la chair fraîche à se mettre sous la dent .Et qui a-t-on- revu dès l’annonce de la démission Marion Maréchal, ex-Le Pen ? 
Et puis la tête de tous ces journalistes, experts, analystes, chroniqueurs ! Les mêmes qui nous annonçaient un effet Bellamy aux européennes, une abstention record, bref qui avaient tout faux, analysaient « de sources sûres » que Wauquiez allait s’accrocher. Alors qu’il a raccroché.
Les prochaines présidentielles, c’est loin. 3 ans avant celle de 2017, qui aurait parié un euro sur Macron ? Et puis en 2022, Marine Le Pen perdra une nouvelle fois face à Macron et alors en 2027… 
En 2027, Laurent Wauquiez aura 52 ans. 
———————–
Et sur l’impétueux Wauquiez on relit l’enquête de Fabrice Veysseyre-Redon et l’interview de l’auteur sur https://youtu.be/0PcdKOLjjW8

Laurent Wauquiez : Jacques Barrot doit se retourner dans sa tombe.

Barrot-Wauquiez: C’était avant “le meurtre” du père ? 
Il est indécent de faire parler les disparus. Comme toutes celles et ceux qui citent à tout bout de champ le Général De Gaulle. « Comme disait le Général » ou «Imaginerait-on De Gaulle faire cela ? ».  
Mais l’on peut quand même avoir un peu de mémoire et à Yssingeaux, dont Jacques Barrot a été le député maire, en Haute-Loire, qui a été la première marche dans l’ascension de Laurent Wauquiez, on se souvient même si personne ne moufte.
C’est Jacques Barrot qui avait repéré le jeune normalien et énarque Laurent Wauquiez. C’est lui qui en 2004, lui avait servi comme sur un plateau sa circonscription. Sur le point d’entamer une carrière européenne, comme commissaire à Bruxelles, il était tombé sous le charme de ce jeune homme brillantissime qui connaissait mieux la rue de Sèvres du très chic 7 ème arrondissement de Paris, que le foirail ( la Place du marché) à Yssingeaux.
Un ancrage local quasi-inexistant(1) – les Wauquiez étant une famille d’industriels du nord de la France – mais avec le parrainage de Jacques Barrot, l’élection était gagnée d’avance.
A 29 ans, Wauquiez est donc élu député, benjamin de l’Assemblée nationale. Ensuite sa conquête du pouvoir passe par celle du Puy-enVelay, jusque là une belle endormie gouvernée par la gauche.
Gestionnaire dynamique, bull-dozer politique, il commence par éliminer systématiquement toutes celles et ceux qui pourraient rappeler son ancien mentor. Même le fils de Jacques Barrot a dû aller se présenter en région parisienne. Il a été tout récemment élu député La République en Marche, à Vélizy.
Wauquiez est sans pitié pour toute opposition, il coupe toutes les têtes qui dépassent, une tactique qu’il applique également à la tête de la région  Auvergne-Rhône-Alpes. Gaël Perdriau, le maire de Saint-Etienne pourtant Les Républicains lui aussi, se heurte régulièrement au Président de la région, qui en représailles bloque ou diffère des financements promis. Et en octobre 2017, il avait très peu apprécié les déclarations de Wauquiez sur «les quartiers perdus de la République à Saint-Etienne et Firminy ». Des déclarations pas du tout « off ».
Pour ceux qui le suivent et le connaissent depuis longtemps comme le journaliste Fabrice Veysseyre-Redon, originaire de la Haute-Loire qui doit publier en mai un livre : Laurent Wauquiez, la conquête du pouvoir, les déclarations du Président des Républicains sont tout sauf un dérapage : « je ne peux pas imaginer qu’il n’ait pas intégré le fait que cela pouvait sortirLaurent Wauquiez a longtemps été quelqu’un qui montait sur le ring, et qui tapait très fort. Ça fait partie de sa personnalité : il aime quand ça castagne ».
On est fort loin de Jacques Barrot, un homme politique mal connu hors de la Haute-Loire et pourtant une des personnalités marquantes de ce courant politique un peu oublié aujourd’hui que fût la démocratie chrétienne. Courageux, par exemple quand il dût appliquer la réforme de la carte sanitaire à sa propre ville d’Yssingeaux, avec la fermeture de la maternité, mais homme de concertation, européen convaincu, très, très loin des positions défendues aujourd’hui par son ancien poulain.
Jacques Barrot était à l’image de cette Haute-Loire, pays des justes pendant la seconde guerre mondiale – et il n’y en eut pas tant que ça en France – héritier politique et moral de son père, Noël Barrot, pharmacien à Yssingeaux, lui aussi député centriste jusqu’à sa mort en 1966.
La morale de ce bullshit est peut-être à trouver chez l’écrivain Jules Romain, alias Louis Farigoule, qui – lui – est un vrai enfant de la Haute-Loire, né à Saint-Julien-Chapteuil : “La politique est l’art d’arriver par n’importe quel moyen à une fin dont on ne se vante pas.”. Mais il est vrai qu’à l’heure de twitter, peu de personnes ont encore le temps de lire les 27 tomes de sa saga « Les hommes de bonne volonté ». Surtout pas quand on est un homme politique pressé.

————————
(1) La mère de Laurent Wauquiez possédait une résidence secondaire au Chambon-sur- Lignon, commune dont elle est aujourd’hui la maire

© 2025 BLOGODO

Theme by Anders NorenUp ↑