Déjà qu’il fait moche et froid à Paris. Mais là, en plus, cette nouvelle : « Petit-Renaud est mort ».
Waou ! Jean-Luc…
Nous n’étions pas intimes ou amis, mais plus que cela : collègues et je l‘admirais.
En vrac, quelques anecdotes :
C’était, je crois, au printemps 1990.
J’étais correspondant de TF1 en Allemagne et début 90, nous avions décidé de transférer nos bureaux de Bonn à Berlin.
Un jour, un peu après le déjeuner, alors que je retournais au bureau en voiture, je mets France Inter. À l’époque, les forces françaises occupaient pour quelques mois encore un quart de Berlin. La France disposait d’émetteurs qui rediffusaient France Inter en direct. La radio lance son chroniqueur gastronomique.
Je suis en train de traverser le Tiergarten, juste avant le mur encore debout, le ciel de Berlin est gris, et j’entends : « Nous sommes à Villeneuve-les-Avignons, sur les collines en face de la cité des papes. Le soleil tape. On rentre dans un cloître. Et là, le calme, le gargouillis de la fontaine, le bruit du grissement des pas sur le gravier : « cri, cri, cri », le tintement des glaçons dans les verres… » .
On y était : en quelques secondes Petit-Renaud – car c’était lui- nous rendait visible, sensible, ce qu’il vous décrivait. Les plats dont il nous parlait nous pouvions presque les avoir en bouche. Je n’étais plus au Tiergarten, j’étais à Villeneuve-les-Avignons.
On dit souvent que la radio, ce sont des images. Petit-Renaud était un maître en la matière.
Quelques années plus tard, nos vies professionnelles se sont croisées à Europe 1.
Je me souviens d’un déjeuner avec Jean-Luc.
Un déjeuner avec Jean-Luc… attention, danger ! parce que c’était une plongée dans l’art du bon manger. Le respect des chefs, des équipes, la découverte de saveurs, l’apprentissage de l’accord vins-plats. Pisses-froid, manges-guêpes, s’abstenir !
Quand nous sommes rentrés à Europe 1, nous étions… comment dire ? un peu chargés. Et honnêtement, je n’aurais pas été capable de prendre l’antenne. Jean-Luc avait une émission en fin d’après-midi. Quand je l’ai écouté, il était impeccable, toujours la même passion, toujours le même art de nous rendre visibles les plats dont il nous parlait.
Petit-Renaud était un superbe journaliste parce qu’il parlait vrai. Il ne jouait pas. Ce sont ses papilles, son cerveau, son cœur qui parlaient. Il n’était pas seulement un passionné de cuisine, il admirait et aimait les cuisiniers, les chefs.
J’ai sans doute ignoré qu’il y avait en lui d’autres fractures. Et puis la vie nous a éloigné.
Alors aujourd’hui, je prends quelques minutes pour te dire, Jean-Luc, que je t’ai admiré. Ton écriture a inspiré mon travail.
Et je me rends compte aujourd’hui de la qualité de ton amitié, et de ta générosité. Je n’ai pas eu le temps de t’en remercier. Je le fais aujourd’hui.
Salut l’artiste !
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