Le blog de Pierre M. Thivolet, journaliste

Catégorie : OL

Twitter ramollit-il le cerveau ?

Descartes : Je pense donc je tweete !
Quand Donald Trump veut envoyer un oukaze à Ford, il tweete. Quand Obama veut faire ses adieux, il tweete ou il « post » sur Instagram.
Aujourd’hui, la communication passe par le dernier media apparu, pas seulement internet, mais au sein du web, les réseaux sociaux, et parmi les réseaux sociaux, ceux qui sont les plus rapides, les plus concis : Twitter, Instagram : 140 signes.  Ou mieux : Une photo et un hashtag.
Pas la peine de pointer du doigt les nouvelles technologies, ce ne sont que des technologies. Un peu comme l’électricité qui peut aussi bien servir à la chaise électrique qu’à nous éclairer. Tout dépend donc de l’usage que l’on en fait et là ça se complique. Contrairement à une idée reçue, il est beaucoup plus difficile de faire court que de s’épancher. Ça demande de la technique, du travail. Il y en a même qui tente d’en faire leur métier et on les appelle les journalistes.
Chez nos politiques, c’est un peu la panique. Autrefois, une seule chaîne de télé, les citoyens n’avaient pas vraiment le choix. Aujourd’hui un coup de zapette, un clic de souris et on passe chez Hanouna. Alors ils  s‘y mettent toutes et tous, à la petite phrase, aux « punchlines » qui feront le buzz, et c’est verglas et pluies verglaçantes toute l’année: Des dérapages :
Comme le tweet de Macron dans un avion l’emmenant aux Antilles et parlant d’expatriation.
Comme Vincent Peillon déclarant à la télé: « les juifs à qui on mettait des étoiles jaunes, c’est aujourd’hui un certain nombre de nos compatriotes musulmans ». 
Ou la déclaration du Président du Club de foot de Metz, sanctionné après des (graves) incidents lors d’une rencontre contre l’OL : « C’est comme si la justice sanctionnait le Bataclan ».
Ou encore: « Je suis gaulliste et de surcroit je suis chrétien », raccourci un peu surprenant de François Fillon sur TF1.
Tout le monde n’est pas De Gaulle qui alliait le fond et la forme, capable de détourner la langue française pour en faire des punchlines de génie, comme au moment du putsch d’Alger en avril 1961: « Ce pouvoir a une apparence: un quarteron de généraux en retraite. Il a une réalité: un groupe d’officiers, partisans, ambitieux et fanatiques ». Waou ! trop fort , d’autant plus que quarteron ne veut absolument pas dire quatre, mais métis. Qu’importe: En 140 signes, De Gaulle avait clashé et cassé les généraux ! Et d’ailleurs 24 heures plus tard, le putsch échouait.
Et puis ce n’est pas parce qu’on fait simple que l’on écrit simpliste. On peut être écrivain et écrire en moins de 140 signes : « On est heureux Nationale 7 », très belle contraction poétique de Charles Trénet chantant le route nationale qui mène aux vacances. Ou encore Marguerite Yourcenar: « Quoiqu’il arrive j’apprends. Je gagne à tout coup». Mais le plus fort « Je pense donc je suis ». Descartes twitto avant l’heure. Il est vrai qu’il y a 400 ans René le philosophe tournait 7 fois sa plûme dans son encrier avant de se mettre à écrire.
Nous vivons une e-poque formidable.

Ah ! si le Musée des Tissus de Lyon était à Paris ou à Tulle.

Une tunique de 2150 ans avant JC, à voir avant fermeture définitive du Musée des Tissus de Lyon
Connaissez-vous le Musée des Tissus de Lyon ? Non ? Mais vous savez bien que depuis la Renaissance, 1515, François 1er, Lyon est la capitale de la soie, qu’une partie de son économie a été construite sur le travail de ces fils produits par la bave de la larve d’un gros papillon, le bombyx. Une larve gavée par sa nourriture préférée les feuilles de mûrier, et élevée dans toute la vallée du Rhône depuis des siècles. Cela ne vous dit rien ?
Et la révolte des Canuts, vous ne l’avez pas apprise à l’école? Les ouvriers de la « Fabrique » lyonnaise sont le premier prolétariat de la révolution industrielle en France. Ils avaient été concentrés sur les pentes de la Croix-Rousse dans de grands immeubles aux pièces aux plafonds très hauts pour laisser la place au métier à tisser, sans volet, sans rideau pour laisser entrer la lumière. Leur révolte est le premier grand mouvement ouvrier, réprimé dans le sang. Plus de 800 morts et cette chanson : « C’est nous les canuts, qui allons tous nus « 
Et Versailles, vous connaissez ? La chambre du roi avec ses tentures, ses meubles richement recouverts. Eh ! bien tous ces tissus ont été tissés ou retissés par les soyeux lyonnais, des familles aux noms prestigieux, dont certaines remontent à la Renaissance quand tant d’italiens, de lombards sont venus s’implanter entre Saône et Rhône et faire la fortune de cette ville qui à l’époque était à la frontière du Royaume de France et de l’Empire.
Eh ! bien le Musée des Tissus et des arts décoratifs a été créé sur cette histoire–là, sur ces savoirs-faire là. Outre la soierie lyonnaise, on peut y découvrir des tissus venus de toutes les cultures, de tous les âges, depuis que l’homme s’est mis à apprendre à tisser. Une des pièces les plus émouvantes, une tunique égyptienne, en lin, appartenant sans doute à une femme qui aurait vécu 2150 ans AVANT Jésus-Christ !
Le monde entier nous l’envie (si ! si !) mais ni la Ville de Lyon de Gérard Collomb, ni la région Auvergne Rhône-Alpes de Laurent Wauquiez, ni la Ministre de la culture ( qui est-ce au fait ? Ah ! oui Audrey Azoulay ).
Et à la fin de l’année, le Musée devrait donc fermer. Son propriétaire actuel la Chambre de commerce, en pleine réduction de recettes ne peut plus assumer les 2 millions et demi de fonctionnement, ni financer les quelques 20 millions d’euros minimum, pour remettre les bâtiments à niveau, et en moderniser la scénographie.
Pétitions internationales, personnalités qui montent au créneau, ça commence à bouger, les uns et les autres accordent des miettes mais qui ne permettent pas encore de sauver le Musée dans la durée.
Et l’on se dit… Quand on pense à tout ce que Région et Ville de Lyon ont dépensé pour le parc OL – 2 millions d’euros, allez on va être démago : C’est le 1/3 du salaire annuel de Valbuena -, à tout ce que la Ville de Lyon et le département ont payé et paient pour Confluences, à tout ce que l’Etat a dépensé pour le Mucem à Marseille, à toute cette profusion de superbes lieux de culture à Paris et région, on se dit donc que c’est bien dommage que Lyon ne soit pas Tulle pour que l’on s’intéresse un peu plus en « hauts lieux » au sauvetage d’une pépite de notre patrimoine national: Le Musée des Tissus de Lyon.
Nous vivons une e-poque formidable.

OL : Même avec son nouveau stade, Lyon ne fait vraiment pas des lumières.

Au Stade des Lumières, il ne manque plus qu’une équipe et un public !
Ce devait être la consécration : Non pas un stade, mais un complexe, unique en France, et même unique en Europe: Autour du stade, ultra moderne, « digitalisé », baptisé Stade des Lumières en attendant un sponsor (espérons que ce ne sera pas Justin Bridou ou Canard WC), un ensemble de boutiques, de restaurants, d’hôtels, une sorte de parc d’attractions et d’affaires tournant autour du foot. Car aujourd’hui, le business du foot ne se fait plus avec la seule billetterie mais avec tout le « merchandising » décliné autour de l’image d’une équipe. Maillots bien sûr, avec les numéros, les noms des stars du moment, et puis les casquettes, les écharpes, les mugs, et puis encore , les loges réservées à l’année où le business invite ses relations pour conclure des affaires devant un beau spectacle, celui d’une rencontre de foot. On pense bien sûr aux exemples réussis du Barça, avec ses soçios, et des loges que l’on se transmet de génération en génération, du Real, de Manchester, du Bayern etc…
C’était donc le rêve de Jean-Michel Aulas, le Président de l’OL depuis … pratiquement aussi longtemps que la reine en Angleterre, ou Paul Biya au Cameroun. Et sur le papier, c’était loin d’être idiot : L’OL avait accumulé un trésor de guerre, résultat d’années de saine gestion « à la lyonnaise », le Président Aulas avait réussi à mobiliser derrière son projet tous les acteurs de la Ville et de la région. Un arrêt du tram Rhône express desservant l’aéroport a été aménagé, comme également une bretelle d’autoroute et des parkings conséquents. Sauf que… il manque l’essentiel. Et l’essentiel reste une équipe qui gagne.
Parce que, et désolé pour les gones inconditionnels de l’OL, mais le maillot de Lacazette ou de Valbuena se vendent moins bien, c’est un euphémisme, que ceux de Messi, Ronaldo ou autre Eto’o. Entre investir dans le stade, et investir dans une équipe, il semble que Lyon ait vu trop gros.
Et puis, il faut aussi un public, et là un mois à peine après l’inauguration du stade, le président Aulas en est réduit à lancer des appels pour que le stade soit rempli. Et l’on se met à regretter l’ancien stade de Gerland, qui certes devait être modernisé, mais qui avait l’avantage d’être dans la ville, comme le sont les stades des très grandes équipes européennes, le Camp Nou à Barcelone, Santiago Bernabeu à Madrid, Old Trafford, pour le Manchester United, ou encore San Siro, surnommé « la scala du football ». Ces enceintes ont toutes en commun d’être très facilement accessibles, de faire partie du paysage urbain, d’avoir une histoire, une âme, d’être des mythes.
Beaucoup d’eau coulera sous le Pont Pasteur, qui relie au-dessus du Rhône, Gerland à la Confluence, avant qu’on se rende en pèlerinage à OL-Land, comme on le fait pour Old Trafford ou San Isidro.
La devise de Lyon n’est pas comme celle de Paris « Fluctuat nec mergitur » , « Battu par les flots mais ne sombre pas ». Hélas, car l’OL est en train de sombrer. Les coup de gueule de son Président qui accuse toujours  c’est pas moi, c’est les autres – les arbitres, la pelouse, la météo, le public, les medias, pour expliquer les contre-performances  de son équipe pourront-il éviter le naufrage ? C’est un peu triste pour la carrière, la fin de carrière ?  de celui qui fût un très grand Président de Club. C’est aussi inquiétant pour les finances du Club, et au-delà pour les contribuables lyonnais qui sans en avoir été avertis, ont été entraînés par leurs élus, et leur maire, dans le cofinancement de ce projet peut-être un peu délirant.
Avoir de l’ambition, c’est bien, et Lyon en a souvent manqué. Mais garder le sens des réalités était une qualité très lyonnaise. Jusque là.
Nous vivons un e-poque formidable.

Nabil FEKIR: Siffler n’est pas jouer

 

#JMFEKIR

Ainsi, des supporters ont sifflé le nouveau prodige du foot français, Nabil Fékir. A deux reprises, et dans deux des plus hauts lieux du foot: Geoffroy Guichard à Saint-Etienne et le Stade de France.
Ces sifflets sont non seulement une manifestation de bêtise, mais également de racisme, qui nous fait honte, qui devrait nous faire honte. Autant que les « radoteries » du vieux Le Pen avec « l’holocauste, détail de l’histoire ».
Car au-delà de la guéguerre entre Lyon et Saint-Etienne – très exagérée, mais « ça pimente » les rencontres – c’est bien le choix fait par Fékir de préférer l’équipe de France à l’équipe d’Algérie, et le suspens entretenu dans les médias autour de ce choix, qui étaient sifflés.
C’est du racisme de la part de ceux des supporters qui pensent qu’être fiers de l’Algérie, cela doit s’affirmer contre la France et non pas avec. Et qui ne supportent pas qu’un binational fasse le choix de la France.
Mais c’est du racisme aussi de la part des supporters qui reprochent à ce jeune homme d’avoir hésité entre le pays de ses parents et son pays d’adoption.
Oui, Fékir a hésité entre deux maillots, deux nationalités : L’ Algérie et la France, pour finalement se décider pour les Bleus. Au lieu de le discréditer, cette hésitation l’honore. Elle montre qu’à à peine 21 ans, ce jeune homme est bien dans ses baskets (ce qui vaut mieux pour un joueur de foot !). Il sait d’où il vient, quelles sont ses racines, celles de ses parents venus d’Algérie pour donner à leurs enfants un avenir meilleur. 
Mais Fékir est aussi un gone. Un petit lyonnais devenu grand, comme toute cette génération de jeunes pousses élevées dans la passion du foot entre Caluire, Vaulx-en-Velin, Saint-Priest et le centre de formation de l’Olympique Lyonnais. Des jeunes talents qui arrivent même à faire chanceler des stars achetées à coup de dizaines de millions russes ou qataris.
Bien sûr, le choix du maillot français est aussi un choix de carrière pour Fékir. En quoi est-ce choquant ? Toute sa vie de footballeur va dépendre de cette décision. Avec les Bleus, où certes la concurrence va être rude, Fékir a pensé qu’il aurait plus de chances de disputer les plus grandes compétitions européennes et mondiales, malgré tout le respect que l’on doit aux Fennecs algériens – c’est une des meilleures équipes d’Afrique, en pleine croissance, on les a vus tenir tête à l’Allemagne, devenue pourtant championne du monde, et elle est entraînée par qui, d’ailleurs ? Par Gourcuff, père !!! – Bravo Fékir! D’avoir su garder la tête froide pour une décision pas facile.
Parmi les siffleurs, il y a ceux qui trouvent la bi nationalité choquante ? Et pourquoi donc ? A-t-on demandé à Picasso, Chagall, Ionesco, ou Lino Ventura, d’abandonner leurs nationalités d’origine ?
Nous devrions bomber le torse quand Fékir entre sur un terrain vêtu de bleu, et se comporte comme un vrai fakir du ballon rond (oui, celle-là est facile).  Sans être un spécialiste de foot, son talent se voit au premier coup d’œil.
Alors au lieu de siffler des Fékir, des Lacazette and co, nous devrions écrire #JMFEKIR.
Nous vivons un e-poque formidable.

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