Le blog de Pierre M. Thivolet, journaliste

Catégorie : Pape

BFM TV rebaptise le Pape, souverain poncif !

Le Pape, souverain poncif: Un poisson d’avril ?
Est-ce un poisson d’avril, malicieux ? Ou alors, alors le signe d’un laisser-aller éditorial ? Pendant toutes ses éditions de la mi-journée, BFM TV a rebaptisé le Pape François, souverain PONCIF !  Hello ! il n’y a pas de rédacteur en chef dans la régie de BFM ?  Personne dans le cockpit de la rédaction ?
Il est de bon ton aujourd’hui de pointer du doigt le fonctionnement des réseaux sociaux, le buzz des fake news, le grand bordel des infos et du faux sur internet. Mais le web a une excuse, ce n’est qu’une technologie dont le développement a été encore plus rapide que celle du train ou de l’électricité aux siècles derniers.
Alors que les media n’ont aucune excuse. Ils sont faits par des journalistes, dont le cœur de métier est ou devrait être de vérifier, sourcer, recouper, mettre en perspective, hiérarchiser, mettre en forme, présenter, diffuser les informations. Bien sûr internet change ce métier. Quand, il y a encore 30 ans, il fallait plusieurs heures, plusieurs jours pour être au courant de ce qui se passait au fin fond de l’Asie ou même de la France, aujourd’hui la nouvelle du battement de l’aile d’un papillon à Hong Kong nous parvient en moins d’une seconde. Il y a 30 ans, il fallait une station satellite pour réaliser un direct télé. Aujourd’hui on est en direct à partir de son smartphone. 
Certes, tout va vite, mais les rédactions confondent souvent vitesse et précipitation.
Alors, on utilise des expressions qu’on ne connaît pas, qu’on ne comprend pas, et ça fait con. Il faut occuper l’antenne même si l’on n’a rien à dire. A force de parler, de parler, on en arrive forcément à dire des bêtises. Cela conduit parfois à propager des informations partielles, voire fausses, par exemple comme lors du dernier attentat à Trèbes. Ou à écrire n’importe quoi pour présenter le Pape.
Et ça ce n’est pas un poncif, même souverain !

Qu’ont donc en commun le Pape François et Emmanuel Macron ?

Le “En même temps” jésuite se termine mal dans le film “Mission”.
Entre un pape plutôt âgé, pourfendeur des injustices sociales, défendeurs des migrants, et un Président, plutôt (très) jeune, accusé d’être le Président des riches, qu’y-a-t-il en commun ?
Tous les deux sont des « fils de jèzes », des fils de jésuites. C’est-à-dire qu’ils ont reçu la même formation intellectuelle. 
Emmanuel Macron étudia de la sixième à la première, au lycée jésuite d’Amiens, la Providence. Quant au cardinal Bergoglio, il a été le chef de la congrégation en Argentine.
Le fameux « en même temps » vient sans doute de là, plus que d’une hésitation entre la droite et la gauche, un balancement intellectuel, caractéristique du raisonnement jésuite, de la casuistique, du fait de tout traiter au cas par cas.
Archevêque de Buenos Aires, le pape François était hostile à la Théologie de la libération, sympathisante du marxisme. Mais « en même temps », il a été l’évêque des pauvres, refusant de loger dans la palais des archevêques de Buenos-Aires, pourfendant corruption et affairisme des dirigeants argentins.
Le « en même temps » a des vertus. A Rome, comme à Paris, il permet d’arriver au sommet de la hiérarchie, et de mener des réformes tambour battant.
Mais être jésuite veut aussi dire: Etre hypocrite. Et les jésuites sont parfois accusés d’être arrogants intellectuellement. Cela peut provoquer des réactions de rejet et même plus. Comme au XVII ème siècle, quand  les « réductions » indiennes développées par les Jésuites au Paraguay, avec une organisation sociale et économique très avancée firent de l’ombre aux empires coloniaux et esclavagistes de l’époque. Jusqu’à ce que portugais puis espagnols n’y mirent fin par la guerre.
Dans l’Histoire, comme dans le rappelle magnifiquement le film « Mission », le « en même temps » jésuite se termine fort mal. 
Or l’Histoire se répéte perpétuellement, dit-on. Mais en même temps …
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Le pape François et les militaires argentins.

Ceci n’est pas le Pape donnant la communion au Général Videla !

A peine le nouveau Pape avait-il pris ses fonctions, que sont (ré)apparues des accusations concernant son attitude sous la dictature militaire argentine, à la fin des années 70. Pendant ces années « de plomb », comme au Chili, au Paraguay, en Uruguay, au Brésil, les militaires avaient pris le pouvoir, pourchassant notamment les militants d’extrême-gauche, avec force tortures, emprisonnements, disparitions.
Il est tentant de « casser » l’ambiance actuelle, un peu béate, autour du nouveau pape auquel on prête toutes les qualités. Mais il est dangereux de transposer à l’Argentine ce que l’on a connu en Europe avec les dictatures fascistes ou nazis. Et il est faux de voir en François 1° une sorte de Kurt Waldheim austral.
L’ancien Président autrichien avait été éclabloussé par les révélations sur son passé pendant la seconde guerre mondiale[1]. Il n’avait pas été un criminel, ou un nazi actif, mais ce que les autrichiens ou les allemands appellent un «Mitlaüfer»; pas exactement un collabo, mais quelqu’un qui «marche avec» le système.
Ce qui ressort des différentes enquêtes, livres, déclarations sur le passé de François 1° montrent qu’il n’a pas été un « Mitlaüfer ». Mais qu’il n’a pas été non plus un Dom Helder Camara, l’évêque brésilien, figure emblématique de la « Théologie de la Libération » ou un Oscar Romero assassiné par les escadrons de la mort en pleine messe dans sa Cathédrale à San Salvador. Une partie des critiques à l’égard du nouveau Pape viennent de ces milieux d’extrême gauche latino-américains, qui préconisaient la Révolution permanente, la multiplication des « Cuba » partout en en Amérique Latine. Plus personne n’y croit aujourd’hui.
Et puis d’autres attaques viennent en sous-main de l’actuel gouvernement argentin et du mouvement péroniste. Dans les années 1950, le général Perón est l’exemple même du « caudillo » démago ». Profitant de la prospérité de l’Argentine, grand producteur agricole au moment où l’Europe sortait de la seconde guerre mondiale, il « arrosait » les « descamisados », le prolétariat argentin, pour assurer à son pouvoir autoritaire et corrompu le soutien d’une clientèle de défavorisés. La nostalgie des années Perón paralyse encore la démocratie argentine. Et les Kirchner actuellement Président(e) n’ont jamais pardonné à l’ancien cardinal de Buenos-Aires ses attaques contre l’affairisme et la corruption qui les caractérisent.
Les déclarations du militant argentin des droits de l’homme Adolfo Pérez Esquivel, Prix Nobel de la paix 1980, me semblent plus crédibles, qui assure que le Pape n’avait eu « aucun lien avec la dictature”.

Nous vivons une e-poque formidable !



[1] Cf « Le mystère Waldheim » de Luc Rosenzweig et Bernard Cohen , ed.Gallimard

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