Et pendant ce temps-là le naufrage syrien continue
Là, on ne rit plus. On va tous y passer. On nous menace du stade 3 – pas de l’émission de télé, d’ailleurs pas mauvaise du tout, sur France 3 – mais de l’après stade 2, de l’après épidémie, la pandémie.
Les mots font peur plus que les maux. D’ailleurs ils ont même changé le nom du mal, c’est maintenant le covid-19. Plus savant, plus inquiétant. Tandis qu’avec corona, certains y voyaient une référence à la boisson favorite de feu Jacques Chirac.
Le stade 3 donc, on y va. Mais après le stade 3, il y a quoi ? C’est comme pour les tremblements de terre, la fameuse échelle de Richter, à 6, ça tangue, à 7 c’est sérieux, à partir de 8, c’est le Japon, au-delà, il n’y a plus personne.
On ne rit plus. C’est juré, craché – non ! pas craché, ou alors dans un mouchoir – : je respecterai les 5 consignes de prévention.
Se laver les mains. Tiens, si cela nous rendait plus propres, nous français, ce serait un bien pour un mal.
Ne plus claquer la bise, plus de serrage de mains, c’est déjà plus difficile. Quoique chez les anglo-saxons, comme chez les islamistes, c’est déjà le cas. Le « shakehand », c’est quand même plus latin que ricain. Mais quid du « check » ? Vous savez cette manière de se saluer, genre chanteur de hip-hop. Les autorités sanitaires n’en parlent pas, mais le virus doit forcément arriver à sauter de poings en poings, à contaminer de phalanges en phalanges. Comme quoi, nos dirigeants sont vraiment déconnectés – ok ! boomer.
Éternuer dans son coude, c’est déjà plus compliqué. A moins de « daber » régulièrement comme Pogba, ce n’est pas un geste vraiment spontané.
Mais il paraît qu’on peut remplacer le serrage de main, par des coups de pieds, sneakers contre sneakers, la classe ! Attention pas comme Neymar, là, ça vous êtes forfait pour plusieurs semaines. Pas de coup de boule non plus, là vous êtes disqualifiés direct.
On ne rit plus. Pendant ce temps-là, ils sont des centaines de milliers, un million et demi (?) de réfugiés syriens qui vont sans doute arriver chez nous. Déjà un enfant noyé a été repêché au large de l’île grecque de Lesbos. Nous ne pourrons pas dire que nous n’avions pas été prévenus. Cela fait 9 ans que la guerre ravage la Syrie, un demi-million de morts. 3 à 4 millions de réfugiés sont en attente en Turquie. Et pour ces morts-là, le vaccin on l’avait. On aurait pu l’avoir.
Dans le film “Et vogue le navire!”, Fellini met en scène une Europe qui va sombrer.
Et vogue le navire ! E la nave va ! En 1983, Federico Fellini signait un de ses derniers films, comme toujours superbe, baroque, bouillonnant, excessif, tellement italien –dans notre idée de l’Italie du moins – c’est-à-direcomediante-tragediante : Et vogue le navire.
Au début du XX ème siècle, peu avant le déclenchement de la Première guerre mondiale, dans le port de Naples, un groupe de privilégiés, aristocrates, artistes, politiciens, divas, accompagnés d’un rhinocéros ! embarquent pour une croisière de quelques jours. Mais le navire ne va pas voguer comme prévu. Des réfugiés ( serbes) sont recueillis en mer. Un bateau de guerre (autrichien !) les stoppe et exige qu’on les rende. Un terroriste (!) finit par tout faire sauter. Et le navire sombre.
Sommes-nous comme ces passagers de Vogue le navire ! Allons-nous tous couler dans un –joyeux- bordel ?
Certains diront : C’est la faute de tous ces migrants qui nous menacent. D’autres penseront : C’est notre aveuglement et notre égoïsme.
En tout cas, nous allons être vite fixés, car l’embarquement a commencé.
En Italie, qui est avec le Japon, le pays dont la population est la plus âgée du monde, et qui perd chaque année 200 000 habitants : on verra vite si les italiens pourront se passer d’immigration.
En Hongrie ou en Pologne qui semblent oublier les avantages d’une Europe qui a su se montrer solidaire – Vous vous souvenez de la peur du plombier polonais ? -.
Aux Etats-Unis, qui veulent être « first », en oubliant qu’ils ne sont pas seuls au monde et que s’ils peuvent s’asseoir sur les intérêts du Luxembourg, et même sur ceux de la France ou de l’Allemagne, avec la Chine, cela devient vraiment plus compliqué. Et déjà leurs entreprises, leurs agriculteurs et les marchés financiers commencent à rire jaune 🤭😁.
Si ceux qui pensent que le bonheur de leurs peuples est dans le repli sur leur pré carré ou leur hexagone ont raison, nous le saurons donc très vite.
S’ils ont tort, nous boirons tous la tasse. Espérons qu’alors leurs électeurs leur présenteront la note. Comme par exemple aux Etats-Unis pour les élections demid-term en novembre.
Et c’est avec tant de détresse humaine que nous allons faire aimer Paris ?
« Paris je t’aime ». C’est le titre d’un film commandé par la Mairie de Paris, histoire de convaincre les touristes étrangers que décidément notre capitale est la plus belle ville du monde, ou presque. Et que c’est chez nous qu’il faut venir dépenser leur argent et non à Londres, à Milan, ou en Espagne, ce qui malheureusement le cas. Les chiffres dont nous nous gargarisons- La France première destination touristique du monde – cache une autre réalité : Des millions de touristes ne font que passer chez nous, ils n’y dorment pas, ils n’y achètent pas, ils ne dépensent pas…
Et puis, voilà que l’on on rendez-vous à la Rotonde au métro Stalingrad, dans le nord de Paris. En vingt ans, la place, les bords du bassin de la Villette ont été superbement aménagés. Bars, restaurants, cinémas, centre d’arts et d’expositions – le fameux 104 n’est pas loin -. Sur l’eau, pédalos, et bientôt baignade, puisque la mairie de Paris annonce l’ouverture de grands bassins ouverts au public. A partir de l’été 2017, on pourra se baigner dans une eau qui, nous dit-on est redevenue propre, en tout cas baignable.
Mais en sortant du métro Stalingrad ou Jaurès, ce n’est pas Paris plage, Paris festif, Paris magique, mais Paris tragique. Partout des tentes, des centaines de tentes – désolé Quechua, mais ton nom ne rime plus avec évasion, camping, randonnée, mais avec pauvreté, naufrage humanitaire. Partout des abris édifiés à la hâte, des points d’eau aménagés ici ou là, des pissotières, des dizaines de pissotières, plantés en rang d’oignons, de part et d’autre de rues ou d’avenues où l’on ne voit plus les terrasses des cafés ou les devantures des commerces. Avec leurs gilets jaune fluo et leurs balais verts, les employés de la Ville de Paris essaient bien d’évacuer les ordures, de remettre un peu de propreté. Mais ils paraissent bien seuls et désemparés face à cette vague. Ici et là, des équipes d’organisations humanitaires, médecins bénévoles, travailleurs sociaux, et l’on a honte de les voir se démener. Mais c’est comme s’ils tentaient de vider la mer avec une petite cuillère. On a honte de presser le pas pour aller à son rendez-vous. Et de détourner les yeux. C’est toute la misère de notre monde actuel qui est là, la jungle non plus de Calais mais de Stalingrad. Oh ! bien sûr, on l’a vue à la télé, mais là c’est sous nos yeux, tout autour de nous.
Le gouvernement a dit que le problème serait traité la semaine prochaine. Le premier ministre depuis l’Afrique où il est en déplacement, a confirmé que les migrants de Stalingrad seraient mis à l’abri, sur le mode de ce qui a été fait à Calais, jeudi.
Mais pourquoi pas tout de suite ? Chaque heure qui passe est une heure de plus de souffrances pour ces milliers de malheureux. Chaque heure qui passe est également insupportable pour tous les habitants du quartier qui quelque soit leur bonne volonté, sont totalement dépassés. Chaque heure qui passe est une insulte à l’image de Paris.
Et on se demande mais comment en est-on arrivé là ? Et est-ce que l’on voit des scènes comparables en Allemagne, à Londres, à Barcelone ? Qui pourtant accueillent beaucoup plus de migrants que chez nous ?
Valérie Pécresse peut bien annoncer des mesures pour relancer le tourisme en Ile de France, Anne Hidalgo faire tourner des films sur Paris je t’aime. Non, personne ne peut aimer Paris dans de telles conditions, ni les parisiens, ni les touristes.
Au Gabon, ne pouvions-nous pas prévoir que le pouvoir frauderait les élections ?
A l’origine, il paraît que le mot « jungle » vient de l’hindi, jangala, et signifie nature, espace naturel. Mais petit à petit les européens en ont fait un synonyme de enfer, enfer vert, forêt inextricable. La jungle, c’est l’angoisse de l’inconnu, la peur d’un environnement hostile. La loi de la jungle, c’est la violence.
A Calais, c’est la jungle: 9 000 ? 10 000, plus ? (On ne sait plus comment les compter) réfugiés, migrants (on ne sait plus comment les appeler): Reportages, émissions spéciales, films, fictions, récits, romans, visites officielles, déclarations gouvernementales: Qui aujourd’hui peut ignorer ce qui se déroule chez nous, sous nos yeux: Un naufrage de l’humanité.
Que faire ? Eliminons les non solutions, les déclarations démago et à l’emporte pièces, les « ya ka ».
Y’a ka tous les renvoyer loin au-delà de mers, laissons les couler au large de nos côtes (Genre ce week-end les italiens n’auraient pas dû sauver 6000 pauvres hères qui allaient se noyer au large de leurs côtes. Vous vous rendez compte : 6000 êtres humains, sauvés mais pour combien noyés au fond de notre belle Méditerranée, de cette mer que l’on voit danser le long des golfes clairs ».
Y’a ka fermer les frontières (et nos vaches seront bien gardées), construisons un mur à la Trump, genre Corée du Nord – et c’est vrai qu’enfermés chez eux les Coréens du Nord sont vachement heureux – .
Y’a ka les laisser passer et laisser les anglais se débrouiller avec cette patate chaude. Comme si les anglais n’allaient pas nous les retourner fissa, sur nos bateaux, genre un nouveau Trafalgar mais dans la Manche et avec des milliers de migrants en otage.
Au fond de nous mêmes, nous le savons bien: Il n’y a pas de solution simple. Il n’y a plus de solution simple. Car s’il est aussi dramatique, ce problème ne nous est pas tombé dessus d’un coup. Il n’est même pas lié à la vague d’arrivée de réfugiés il y a un an. Et il remonte en fait à la construction du tunnel sous la Manche, à la libre circulation entre des pays où les réglementations sont si différentes. Il aurait fallu anticiper, prévoir. Gouverner c’est prévoir.
Prévoir: Cela aurait dû être possible aussi dans une autre jungle, celle du Gabon. Le Gabon, ce n’est ni la Syrie – pas de guerre civile, pas de menace terroriste. Ce n’est pas le Nigeria, avec ses 180 millions d’habitants, le Gabon n’en compte qu’à peine 1 million et demi. C’est une vieille connaissance de la France, on le présentait même comme la vitrine caricaturale de la Françafrique. Et tout ça pour ça ? Nos experts, spécialistes, diplomates n’ont pas vu venir le coup ? Allons donc, tout le monde savait que les Gabonais aspiraient au changement. Tout le monde savait que les Bongo n’accepteraient pas volontiers de partir après presque 50 ans de pouvoir absolu.
Et maintenant nous sommes coincés : Intervenir ? Paris sera accusée de néo-colonialisme. Ne rien faire ? Le Gabon risque de plonger dans la violence, et les Gabonais n’oublieront pas que nous les avons lâchés quand ils aspiraient eux aussi à un changement démocratique et pacifique.
Gouverner c’est prévoir. Au Gabon, comme à Calais nous avons laissé se développer la loi de la jungle au détriment d’une bonne gouvernance.
Il y a 70 ans, déjà: Sur les plages d’Argelès, des barbelés pour contenir des migrants
C’est un peu tuant, pardon, un peu fatiguant, cette noria de donneurs de conseils, ce défilé d’experts qui nous répètent qu’ils nous « l’avaient bien dit » que « je l’avais annoncé il y a déjà 3 ans ». D’ailleurs, c’est fou le nombre d’experts terrorisme ou mieux d’experts Etat islamique qui se cachaient dans toutes les rédactions de France, de Navarre et de Belgique, et nous ne le savions pas. Pratiquement plus d’experts que de terroristes !
C’est un peu saoulant de s’entendre culpabilisés par tous ces Savonarolede pacotille qui non contents de nous annoncer le pire, nous expliquent que si nous allons beaucoup souffrir c’est parce que nous avons beaucoup pêché, par naïveté. « Repentez-vous, il est encore temps » tweetent-ils alors que nous sentons déjà le bûcher des vanités nous lécher la plante des pieds, comme autant de Jeanne d’Arc qui n’auraient pas été rachetées par Gérard de Villiers – non ! pas Gérard mais Philippe, c’est moins drôle -.
Y en marre de toutes ces Madame Irma qui nous annoncent les attentats à venir, aussi sûrement que neige en novembre, Noël en décembre.
Et puis, il faudrait savoir: D’un côté on nous dit, « N’ayez pas peur », continuez à vivre normalement, sinon les terroristes auront gagné. Et de l’autre : « Nous sommes en guerre ». Et là on ne comprend plus. Si on est en guerre alors c’est tous aux abris, non ?
Evidemment qu’on a peur: Gare de Lyon, dans la cohue des départs pour Pâques, tous les barbus même sans barbe paraissent suspects. Et puis ce groupe-là, ils ont vraiment de gros sacs : Sont-ce vraiment des skis et des chaussures ?
Evidemment qu’on s’attendait, et qu’on s’attend à des attentats. Mais que devrions-nous faire ? Suspecter tous les Mohamed ou les Salima ? Si on gratte bien les discours des Robert, Marion et autres Marine, c’est bien ce que l’on nous propose. Avec des glissements progressifs vers la parano. Si lui n’est pas coupable, alors, c’est son frère, son père ou son cousin. Ils n’ont rien fait ?Ils ne sont pas pratiquants ou croyants? Pas encore. Un jour ou l’autre, le kamikaze qui sommeille en tout arabe (et/ou musulman, tant qu’à faire, amalgamons, Dieu reconnaîtra les siens) ressortira; C’est dans leurs gènes, on vous dit. On croirait du copier-coller avec la littérature antisémite des années 1930. Faut-il avoir peur de tous les migrants ? Nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde, non ? Dérouler des barbelés, construire des centres de rétention, construire de nouveaux Camp d’Argelès ou Camps des Milles,au moment où nous inaugurons des mémoriaux pour nous souvenir du sort que nous avions réservé à ceux qui fuyaient le fascisme de Franco, de Mussolini ou d’Hitler.
Bien sûr que nous n’avons pas connu, mais ne faut-il pas connaître l’Histoire pour ne pas reproduire à l’avenir les erreurs et horreurs du passé. Les allemands appellent cela la Vergangenheitsbewältigung. Non ce n’est pas un gros mot,cela veut dire la « confrontation avec l’Histoire », maîtriser le passé, en tirer les leçons,et cela fonde leur démocratie d’aujourd’hui.
Devons-nous écouter les sirènes qui nous conseillent de nous enfermer dans notre pré carré, dans notre maison France. Comme si c’était une sorte de panic room que l’on pouvait isoler du reste du monde. Quelle horreur: se retrouver coincés dans une France confinée, en attendant l’arrivée d’hypothétiques secours… Nous avons tous vu ça dans les films américains, et ça ne se passe pas bien. Car, même parfaitement conçues, ces panic room ont toutes un vice caché. Elles ne sont pas sûres à 100 % contrairement à ce que promettaient les fabricants. On nous aurait trompés ? Les y’a qu’à:y’a qu’à faire ça, y’a qu’à prendre telle mesure, nous auraient donc menti ? Les « avec nous au pouvoir, ça ne serait pas arrivé » ne seraient que des Tartarins ? En 1940 déjà, les ancêtres de Marine, Marion et autres Robert ou David avaient vendu à nos parents la ligne Maginot comme la défense absolue contre la barbarie nazie. On sait à quel point cela a été efficace ! Nous vivons une e-poque formidable.
Mama Merkel: Contrairement à beaucoup de ses homologues européens, une dirigeante qui a des “couilles”!
800 000 personnes : C’est le nombre de « migrants » – appelons les plutôt réfugiés – que l’Allemagne est en train d’accueillir en quelques semaines. 800 000 personnes : C’est autant que le nombre de rapatriés d’Algérie que la France a –mal- accueilli à l’été 1962, au moment de l’indépendance de l’Algérie. A l’époque la France, « le pays le plus généreux du monde » selon Dupont-Aignan, n’avait rien préparé pour recevoir les pieds-noirs, pourtant des compatriotes dont le premier hiver passé dans un pays qu’ils ne connaissaient souvent pas, fût particulièrement difficile. Sans parler des harkis.
800 000 personnes; À comparer aux 20 000 ? 24 000 personnes généreusement concédées par François Hollande ! C’est honteux, mais le pire c’est que pour nous donner bonne conscience, dirigeants politiques comme chroniqueurs des chaines télés y vont de leurs petits commentaires perfides sur les « arrière-pensées cyniques de cette générosité allemande ».
Il y a d’abord l’idée fausse répétée à l’envie par un Jean-Luc Mélenchon mais reprise sans vérification par les journalistes : L’Allemagne est un pays à la démographie déclinante:
Faux : Depuis 2014, donc avant l’arrivée des réfugiés, la population allemande augmente plus vite que la population française. D’abord en raison bien sûr d’une immigration, venue de toute l’Europe, Espagne, Italie, Grèce et du monde entier, attirée par une économie dynamique et le quasi plein-emploi. Et en l’an 2000, l’Allemagne a même introduit le droit du sol, plus généreux qu’en France, une première dans son histoire.
Commencent aussi à se faire sentir les premières conséquences des mesures prises depuis une quinzaine d’années en faveur de la natalité. L’Allemagne prend le chemin inverse du nôtre. On verra bien dans quelques années les conséquences sur le taux de natalité en France, du tripatouillage des systèmes d’aide aux familles, rognées de lois de finances en loi de finances.
Deuxième cliché, deuxième idée fausse: Les allemands seraient tous comme un seul homme, la bouche en cœur, la fleur à la main, à accueillir les réfugiés. Oui, il y a une vraie mobilisation des médias, des églises, de la population, mais on ne change pas un pays, une culture en quelques jours. Le nombre d’allemands hostiles aux « étrangers » augmente rapidement. Sans parler de la fracture ouest-est, qui 25 ans après la chute du mur se révèle encore plus: Les attaques contre les foyers d’étrangers se multiplient, comme les manifestations du parti xénophobe Pegida. On verra si les réfugiés orientés vers des centres d’accueil installés à Leipzig ou Dresde en Saxe, vont être aussi bien accueillis. Il faut dire que l’ancienne Allemagne de l’Est est le parent pauvre de l’Allemagne. Certes les allemands – de l’Ouest- se sont collectivement serrés la ceinture pour financer la remise à niveau de l’ancienne Allemagne communiste, routes, fibres optiques, éoliennes, rénovation de toutes les villes et villages : Le changement est spectaculaire. Mais dans le même temps, près de deux millions de personnes ont émigré à l’Ouest pour y trouver du travail. Et en dehors de quelques grands centres, dans les petites villes d’Allemagne de l’Est, ne restent plus que les retraités et les chômeurs.
Ce qui fait la différence c’est l’engagement des dirigeants politiques allemands et notamment d’Angela Merkel : Contrairement aux élucubrations chez nous non seulement des dirigeants du FN mais également d’élus de droite et de gauche, obsédés par la peur de la peur des français des « grandes invasions », la chancelière prend des positions impopulaires, courageuses. Il lui aurait été plus facile de caresser son électorat dans le sens de la démagogie.
Mais peut-être, comme beaucoup d’allemands, comme beaucoup de familles allemandes, se souvient-elle des drames qui ont ponctué l’histoire récente de l’Allemagne.
La fuite des allemands de l’Est enfermés derrière le rideau de fer.
Mais aussi après 1945, l’expulsion de plus de 15 millions d’allemands de toute l’Europe de l’Est.
Et encore avant, l’errance désespérée de centaines de milliers d’allemands et d’autrichiens fuyant le nazisme parce que opposants politiques, juifs, artistes, homosexuels et qui trouvèrent trop souvent portes closes. Comme en France par exemple, où l’extrême-droite criait déjà à l’invasion de ce qu’elle appelait à l’époque la « vermine venue de l’Est ». La “France des droits de l’Homme” qui finit même par ouvrir des « camps de rétention » – comme ce que réclame aujourd’hui, Nicolas Sarkozy – en fait de « concentration » où furent emprisonnés réfugiés allemands, comme également espagnols.
Faire de la politique, c’est aussi apprendre des générations qui nous ont précédé, avoir de la mémoire, ne pas oublier les erreurs et les fautes du passé pour essayer de ne pas les reproduire à nouveau.
Nous devrions méditer le suicide du grand philosophe allemand Walter Benjamin, le 28 septembre 1940, à Port-Bou, près de la frontière espagnole dans ces conditions tragiques de réfugié traqué, tentant de fuir les nazis et le régime de Vichy. Il écrivit ces derniers mots, dans notre langue : « Dans une situation sans issue, je n’ai d’autre choix que d’en finir. C’est dans un petit village dans les Pyrénées où personne ne me connaît que ma vie va s’achever ».