Retraite, retraites. 

En français, déjà, le mot sonne mal. 

En allemand, « Rentner » évoque plutôt le « rentier », comme celui des romans de Balzac ; vivre de ses rentes, c’était plutôt flatteur, on pouvait même être un « beau parti ». La comparaison s’arrête là, en Allemagne, l’âge de la retraite est fixé à 67 ans, et les retraités allemands pour beaucoup ne roulent pas sur l’or…

En espagnol, « jubilado », évoque mais – attention aux faux amis- le jubilé, comme l’on dit (disait) : le « jubilé de la reine d’Angleterre », pompe et circonstances, ou encore la joie, la jubilation d’être payé à ne rien faire. En effet, le mot viendrait du latin « jubilar », qui signifie « pousser des cris de joie ». 

Est-ce pour cette raison – pousser des cris de joie – que le jour de la manif contre la réforme, Emmanuel Macron a effectué une visite officielle en Espagne chez le socialiste Pedro Sanchez ? 

Peut-être, car en Espagne, l’âge de départ à la retraite, 65 ans aujourd’hui, sera repoussé à 67 ans en 2027. 

L’Espagne voit sa population vieillir et même diminuer, comme le Japon, comme l’Italie, comme la Chine, La solution adoptée est donc de reculer l’âge de départ à la retraite. 

Mais attention, n’en tirez aucune conclusion sur ce que je peux penser de la réforme des retraites : eux, c’est eux, nous c’est nous. Leurs ancêtres n’ont pas pris la Bastille et n’ont pas écrit la Déclaration des Droits de l’Homme, non mais ! Et si ces peuples acceptent sans broncher la casse sociale, nous, non !

Et puis retraite, chez nous, ça n’évoque pas forcément des pages glorieuses de notre histoire… A commencer par celle de Russie ; la retraite. 

221 ans après, on en a froid, même en plein été, en pensant à tous ces pauvres malheureux soldats que la folie de Napoléon avait envoyés jusqu’à Moscou pour mourir gelé sur les bords de la Bérézina. On parle de plus d’1 million de soldats français morts, alors que la France avait deux fois moins d’habitants qu’aujourd’hui… Ça a ratiboisé les populations des villages de l’Auvergne jusqu’en Bretagne, et durablement freiné la démographie française, puisqu’il n’y eut ensuite presque plus d’hommes en âge de procréer. On dit merci qui ? 

Notons d’ailleurs qu’après avoir connu après les années 1950, 40 à 50 années glorieuses, la France prend également la voie du déclin démographique puisque le taux de natalité qui faisait la fierté de nos démographes est en train de s’effondrer. 

Tant mieux diront certaines et certains, qui pensent qu’avec le réchauffement climatique, la crise énergétique, les conflits en tout genre, no future, pourquoi faire des enfants ? 

Finalement, ils comptent sur les autres pour que les enfants des autres paient leurs retraites.

Alors faut-il reculer l’âge de départ ? Ou bien y-a-t-il d’autres solutions pour continuer à financer notre système de retraites. 

Et la pénibilité ? Prise en compte dit le gouvernement, injustices, disent les opposants. 

On comprend bien que le travail de caissière ou de maçon est physiquement plus éprouvant que celui de banquier ou de journaliste.

Mais dans 30 ans y-aura-t-il encore des caissières ? Et quel sera la pénibilité du travail d’un maçon ou d’un conducteur de métro ?  Y aura-t-il d’ailleurs encore des conducteurs de métro ? 

Chacun y va de son argument, balance des chiffres de casse sociale, d’autres de sauvetage du système.

Toutes les retraites n’étant pas de Russie, gouvernement ou/et oppositions doivent-ils battre en retraite pour que l’on arrive à un compromis ?

Évidemment, on est plus tenté par ceux qui ne souhaitent rien changer – parce que au moins on sait ce qu’on a – que par ceux qui nous demandent de nous projeter à 30 ans. 

Si dans 30 ans, on s’aperçoit qu’il n’y plus suffisamment d’actifs pour payer les pensions d’un nombre toujours plus importants de retraités, la plupart de celles et ceux qui nous disent que la solution c’est ceci ou au contraire cela, eh ! bien ils ne seront plus là, même si évidemment on leur souhaite de vivre centenaires et au-delà. 

Et alors nos enfants ou petits-enfants n’auront plus que leurs yeux pour pleurer. 

Ce qui est sûr c’est qu’en matière de retraite, les conseilleurs ne seront pas les payeurs.