C’est une chance pour la Seine-Saint-Denis, le département le plus pauvre d’Île de France. Avec la construction de la piscine olympique, les enfants de Saint-Denis deviendront de futurs Mauresmo, avec le village olympique, le centre de presse, autant de futurs logements qui élimineront le mal-logement. Et puis seront construites de nouvelles infrastructures qui serviront les parisiennes et les parisiens: Comme ce super RER pour relier l’aéroport Charles-De-Gaulle, pour 30 euros, ce qui permettra aux hommes d’affaires de ne plus se farcir les matins glauques dans des RER B bondés. Et puis tellement d’emplois. On parle de 250 000 emplois créés. Dont profiteront évidemment les jeunes depuis Bac – 2 jusqu’à Bac + 5. Qui sont, comme on sait, la main d’oeuvre recrutée en priorité par les grands chantiers du BTP. Bien sûr ne parlons pas des questions qui inquiètent comme la sécurité. Y penser toujours en parler jamais.
Et puis surtout les JO vont booster l’attractivité de Paris. C’est vraiment utile, car notre capitale est peu connue, certains la confondent même avec une ville du Texas. ( petite référence cinéphile à nos amis allemands et le film de Wim Wenders Paris-Texas ). Et forcément ils sont déçus. Ils s’attendent à voir des cow-boys dans les rues et ils errent au milieu de migrants qui dorment sous la pluie, ils pensent voir Montmartre et ils croisent des rats, et des parisiens, comment dit-on à Marseille ou à Lyon ? Tête de chiens. Donc pas si magiques que ça.
Ce qui explique que derrière les chiffres : Paris première destination touristique, la France première destination du monde, se cachent d’autres chiffres: Moins de recettes touristiques que l’Espagne ou les Etats-Unis, des séjours très courts, on traverse la France mais on va faire ses courses à Londres et la fête à Barcelone.
Mais en 2024, grâce aux JO, ce sera l’inverse. C’est magique. Comme Paris.
Paris a-t-elle vraiment besoin des JO pour être attractive ?
Paris aura les Jeux. Paris a gagné. Contre ? Contre personne. Car aucune autre ville n’était candidate, à part L.A. Les habitants de Budapest ou Hambourg avaient répondu: Non merci ! Les JO semblent porter la poisse aux villes organisatrices: Athènes ou Rio, tristes précédents avec endettement et explosion des budgets.
On nous dit que Paris 2024 (ou 2028, seul petit doute) ce sera différent. On peut en douter quand on voit notre dette et notre déficit budgétaire.
On nous dit que Paris 2024 boostera l’attractivité de notre capitale. Mais est-ce nécessaire quand on a déjà la Tour Eiffel et Notre-Dame ? L’enjeu n’est pas plus de touristes mais « mieux » de touristes, qu’ils restent plus longtemps, dépensent plus et sur tout le territoire.
Et puis pourquoi encore et toujours Paris ? Cela fait 70 ans que l’on dénonce Paris et le désert français *. La concentration de nos richesses à Paris et sa région a conduit à la naissance d’une hypercapitale où tout est plus cher. Nous l’acceptons avec une sorte de fatalisme historique « parce que c’est la capitale ». L’Etat continue à surinvestir à Paris et les conditions de vie continuent à y être de plus en plus difficiles. Les infrastructures peinent à suivre. RER à bout de souffle. Manque de transports banlieues banlieues. Même les aéroports : Il suffit d’y voir la pagaille pour ces départs en vacances.
Il faudrait décentraliser, conforter d’autres métropoles. On aurait pu proposer Marseille 2024, avec une organisation régionale, associant le grand Sud-Est. Pour l’Exposition Universelle 2025, on aurait pu choisir Toulouse ou Strasbourg. Non, c’est Saclay, c’est-à-dire Paris qui est proposée.
En 1992, l’Espagne avait choisi Barcelone pour les Jeux Olympiques, Séville pour l’Expo Universelle. Permettant de restructurer et de booster ces deux villes. Et cela a marché: Comparez aujourd’hui l’image de Barcelone à celle de Marseille. Y’a pas photo. Et c’est bien dommage. Cela devrait être le contraire.
* Paris et le désert français du géographe Jean-François Gravier, publié en 1947
Pas question de ne pas faire cocorico et de ne pas chanter à l’unisson avec tous les porteurs du dossier JO Paris 2024. D’autant plus que toutes les autres candidatures « sérieuses » semblent faire faux bond. Donc, c’est un peu comme l’élection de Platini à la Présidence de la FIFA, les JO à Paris, ça paraît plié. Mais ce n’est pas forcément une bonne nouvelle, les JO à Paris, pas l’élection de Platini !
Bien sûr, il y a l’argument économique: Ca va booster l’activité avec des chantiers, du tourisme etc… Et l’on avance l’exemple de Londres, qui affiche des comptes dans le vert, qui a rénové une partie de ses quartiers-est laissés en friche, et qui a boosté son tourisme jusqu’à dépasser Paris comme première destination touristique. Même si en fait les chiffres publiés à Paris comme à Londres ne sont guère fiables, mélangeant tout et n’importe quoi. Ainsi à Paris, on comptabilise les touristes provinciaux, alors que Londres ne compte que les touristes étrangers. Ce qui fait la différence, c’est bien le nombre de nuitées et l’argent dépensé par les touristes, et là, on le sait bien, c’est encore à Londres que l’on vient faire du shopping. Sur ce plan, les JO feront moins que l’ouverture des magasins le Dimanche !
Autre avantage de Londres, contre lequel nous aurons du mal à lutter : Le business que rapportent Kate et William et leurs royal babies. Ce n’est pas faire injure à Anne Hidalgo que de penser que les mugs à son effigie feront toujours moins recette que ceux avec Baby George ou la petite Charlotte : So cute !
On nous vend aussi les retombées en terme d’aménagement du territoire, d’infrastructures. Mais un des problèmes français est « Paris et le désert français », l’attractivité de la province, la surconcentration de notre population, de nos forces, de nos richesses dans une seule grande métropole, où la construction de nouvelles infrastructures devient de plus en plus coûteuse. Cela fait cinquante ans que l’on dit qu’il faut décentraliser. Or nous continuons à faire l’inverse du choix allemand ou espagnol.
Il est d’ailleurs scandaleux que l’on nous fasse un chantage aux JO pour construire de nouveaux transports ou de nouveaux équipements en région parisienne. Quoi ? Si nous n’acceptons pas les JO, vous ne modernisez pas les RER ? Vous ne construirez pas de piscines ?
Il y aussi l’explosion des budgets prévisionnels: Paris 2024 annonce 6 milliards d’euros. On ne sait pas très bien ce que cela représente, mais nous savons que ce sera plus. Forcément. Même si nous n’atteindrons pas les délires de Sotchi ou de Pékin.
En revanche, il y a beaucoup d’exemples où les JO semblent porter la poisse.
A Athènes bien sûr, où les herbes folles ont envahi une partie des installations olympiques. Les J.O ont sans doute contribué à la faillite que traverse la Grèce aujourd’hui, mais ils ont surtout servi de révélateurs des disfonctionnements du pays, avec notamment la corruption qui a fait évaporer une bonne partie des financements.
C’est également ce qui est en train de se passer à Rio, où se dérouleront les JO dans un an. Le Brésil est entré dans la pire récession économique depuis 30 ans, le gouvernement paraît désemparé pour contrer l’inflation, relancer la croissance. Les manifestations se multiplient sur fond de la plus grande affaire de corruption jamais connue par le pays. Car, et c’est une avancée de la démocratie brésilienne, aujourd’hui la justice y est indépendante. Elle enquête sur les principaux dirigeants de Petrobras, le géant du pétrole, mais aussi de toutes les grandes sociétés brésiliennes, notamment celles du BTP. Plusieurs députés et ministres ont été mis en examen ou en prison. Le scandale éclabousse l’actuelle présidente Dilma Rousseff et même Lula, son prédécesseur.
Dans un an, les JO à Rio risquent d’être moins « samba » que « Dilma fora », c’est-à-dire « Dilma dehors », une démission souhaitée par 65 % des brésiliens.