Paris a-t-elle vraiment besoin des JO pour être attractive ?
Paris aura les Jeux. Paris a gagné. Contre ? Contre personne. Car aucune autre ville n’était candidate, à part L.A. Les habitants de Budapest ou Hambourg avaient répondu: Non merci ! Les JO semblent porter la poisse aux villes organisatrices: Athènes ou Rio, tristes précédents avec endettement et explosion des budgets.
On nous dit que Paris 2024 (ou 2028, seul petit doute) ce sera différent. On peut en douter quand on voit notre dette et notre déficit budgétaire.
On nous dit que Paris 2024 boostera l’attractivité de notre capitale. Mais est-ce nécessaire quand on a déjà la Tour Eiffel et Notre-Dame ? L’enjeu n’est pas plus de touristes mais « mieux » de touristes, qu’ils restent plus longtemps, dépensent plus et sur tout le territoire.
Et puis pourquoi encore et toujours Paris ? Cela fait 70 ans que l’on dénonce Paris et le désert français *. La concentration de nos richesses à Paris et sa région a conduit à la naissance d’une hypercapitale où tout est plus cher. Nous l’acceptons avec une sorte de fatalisme historique « parce que c’est la capitale ». L’Etat continue à surinvestir à Paris et les conditions de vie continuent à y être de plus en plus difficiles. Les infrastructures peinent à suivre. RER à bout de souffle. Manque de transports banlieues banlieues. Même les aéroports : Il suffit d’y voir la pagaille pour ces départs en vacances.
Il faudrait décentraliser, conforter d’autres métropoles. On aurait pu proposer Marseille 2024, avec une organisation régionale, associant le grand Sud-Est. Pour l’Exposition Universelle 2025, on aurait pu choisir Toulouse ou Strasbourg. Non, c’est Saclay, c’est-à-dire Paris qui est proposée.
En 1992, l’Espagne avait choisi Barcelone pour les Jeux Olympiques, Séville pour l’Expo Universelle. Permettant de restructurer et de booster ces deux villes. Et cela a marché: Comparez aujourd’hui l’image de Barcelone à celle de Marseille. Y’a pas photo. Et c’est bien dommage. Cela devrait être le contraire.
* Paris et le désert français du géographe Jean-François Gravier, publié en 1947
Même pendant les JO, la politique brésilienne continue!
Les JO de Rio se sont achevés comme ils avaient commencé, par une fête aux accents de Carnaval, Brésil oblige. Et n’en déplaise à ceux qui prévoyaient une catastrophe, tout s’est bien passé. La fête du sport a été réussie, la sécurité a été assurée, avec la mobilisation de dizaines de milliers de policiers et de soldats, les équipements ont été prêts à temps, ou presque, même s‘il a fallu en terminer certains jusque dans les dernières minutes. Là aussi, Brésil oblige!
Cela n’aura été une surprise que pour ceux qui n’avaient du Brésil qu’une (mé)connaissance faite de clichés tropicaux: Car quelque soient les difficultés qu’il traverse, le Brésil n’est pas un pays anecdotique, ce n’est plus un pays de seconde zone. C’est un des géants de notre monde, la septième ou huitième économie de la planète. Comme le formulait l’ancien Président Fernando Henrique Cardoso, ancien enseignant à l’Ecole de Hautes Etudes en Sciences Sociales à Paris, social-démocrate, véritable artisan de la démocratisation et du décollage du modèle économique brésilien, avant Lula : « Le Brésil n’est pas un pays pauvre, c’est un pays injuste ». Et c’est cette dure réalité que les brésiliens retrouvent, à peine la flamme olympique éteinte.
Pendant les JO, les juges anti-corruption de l’opération “lava jato”, “lavage au karcher”,n’ont pas suspendu leur travail. Plusieurs politiques de premier plan ont été mis en examen, d’autres contraints à la démission comme Eduardo Cunha, Président de l’Assemblée Nationale, artisan de la destitution de la Présidente Dilma Rousseff. Il risque la prison.
L’étau se ressert aussi autour de l’ancien Président Lula. Il a beau être populaire et charismatique, il semble bien avoir trempé dans la gigantesque affaire de corruption liée à Petrobras, l’entreprise nationale de pétrole. Au total, ce sont des dizaines, voire des centaines d’élus qui risquent le même sort, toutes étiquettes politiques confondues.
Le paradoxe est qu’une des moins corrompues semble être Dilma Rousseff, la Présidente suspendue. Il lui est reproché d’avoir maquillé les comptes de l’Etat pour favoriser sa réélection il y a deux ans. En fait elle paie à la fois la mise en cause pour corruption de nombreux de ses amis politiques et son incapacité à relancer l’économie du pays en pleine récession. Et elle a beau crier au « coup d’état », message relayé en France par une partie d’une presse restée aux années 1970, aux heures de la dictature militaire, dans quelques jours, le Sénat devrait confirmer sa destitution
Michel Temer, l’actuel Président par intérim, essaiera alors de tenir jusqu’aux prochaines élections prévues pour 2018. Mais il n’a ni la légitimité du suffrage universel, ni charisme, ni popularité, et une partie de ses soutiens politiques, ministres, députés ou sénateurs, sont déjà eux aussi rattrapés par les juges.
Même s’il s’y refuse, nombreux sont ceux aujourd’hui au Brésil qui réclament des élections anticipées.
Ce qui ne sortirait pas forcément le Brésil de la crise politique: La corruption est au cœur du système électoral. Bien souvent élections riment avec clientélisme et achats des voix. Un système aussi vieux que la République brésilienne et qui commence à peine à être purgé par la justice. Ce qui est nouveau cependant c’est que les brésiliens ne se laissent plus endormir. C’est le sens de toutes ces manifestations qui se sont multipliées non pas ces derniers mois, mais depuis plusieurs années, au moins depuis la Coupe du monde de football il y a deux ans. Les scandales liés au détournement d’argent dans la construction des stades et des infrastructures, ont été le grand déclencheur. Car, pour les classes moyennes aujourd’hui majoritaires au Brésil, la corruption est le principal frein au développement du pays. Mettre fin à la corruption, c’est relancer la croissance. Une épreuve plus difficile qu’un décathlon avec Kévin Mayer, un 100 mètres avec Usain Bolt, un combat avec Teddy Riner.
Et il est bien fini le temps où la fête et le Carnaval pouvaient faire illusion. Comme le chantaient les grands Antonio Carlos Jobim et Vinicius de Moraes :