Vieille sagesse toujours valable à l’heure du breaking news, du tout info, de la communication digitale, certains/es devraient apprendre à tourner leur langue 7 fois dans leur bouche. 

Prenez n’importe quel soir, n’importe quel jour : vous zappez, vous scrollez, et vous tombez sur …allez pas de nom… sur LCI, sur Cnews, sur BFM, qui vous annoncent : « avoir pris un coup de poing dans la poitrine », c’est « historique », « les russes ont bombardé la Pologne ». Là on se dit : « M….. J’aurais dû acheter plus de rouleaux de papier WC, et plus de coquillettes ». 

On suit alors avec angoisse les commentaires d’experts, que l’on avait vus la veille nous expliquer l’Iran, et 2 jours avant, la politique américaine et une semaine avant encore, la crise de l’énergie, et avant, le Mali, et avant, le Brésil… 

C’est fou le nombre d’experts capables d’expertiser sur tout. Ils sont les « Pic de la Mirandole » de nos sociétés de l’information. ( Pic, quoi ? : point culture, vite wiki !)

Et voilà qu’au réveil, on apprend que finalement non, la Russie n’a pas (encore ?) attaqué la Pologne, donc l’OTAN, donc nous. 

On s’attend à des rétropédalages, des excuses, ou en tout cas, des commentaires plus pondérés… eh ! bien non, une « info » chasse l’autre, ou plus exactement un « clash », une headline qui claque, le # hashtag de la mort, rien ne doit arrêter la noria des « breaking news ». 

Pas de mémoire, ou alors celle de poissons rouges, un tour de bocal et on recommence tout. 

Pas de recul, pas de doutes : imagine-t-on l’envoyé spécial, l’envoyé sur place qui doit alimenter des directs toutes les ½ heures accepter de dire qu’il ne sait pas grand-chose, qu’on ne sait pas grand-chose. Car il est vrai que sur place souvent on ne voit qu’une toute partie du tout. Mais c’est cela le reportage : rapporter ce que l’on voit, ce dont on est témoin. En toute subjectivité : Vous étiez là et telle chose advint. Mais sur le terrain, les événements ne se révèlent pas dans leur totalité, dans leur complexité. Et c’est bien normal. 

C’est alors le rôle du media, des rédactions en chef, de combiner tous ces reportages, de les mettre en perspective, les compléter, les combiner. 

Visiblement le travail obscur mais essentiel des rédacteurs en chef, est aujourd’hui éclipsé par l’appel des lumières du « plateau », l’animateur supplante le journaliste. Ma mère m’a vu à la télé, waou !

Il n’y a plus de place pour le doute : À l’heure du numérique, pardon du digital, on nous demande d’être binaire 1-0.

Il y a une semaine on nous annonçait « la vague rouge » de Trump aux États-Unis, aujourd’hui, elle est où la vague rouge ? 

Il y a un mois, on expliquait que la reprise de Kherson en Ukraine prendrait du temps. Bon, ben aujourd’hui c’est fait ;

Et puis, après Covid saison 8, il y a la variole du singe, la bronchiolite, la vitrification par les bombes atomiques russes, les bombes sales de on ne sait plus qui, l’hiver en doudoune et en col roulé, le prix de l’essence plus cher que le beaujolais nouveau. Bref pas d’infos sans catastrophe. 

Finalement, on en revient à une vieille loi de la circulation de l’information : « un chien qui mord un évêque, ce n’est pas une info, mais un évêque qui mord un chien, ça, c’est une info ». 

A force de courir derrière les « breaking news », et de blablater sur tous les sujets, on en arrive à dire des bêtises. Pas étonnant alors, que notre crédibilité, à nous les journalistes, soit tombée si bas…Apprendre à tourner sa langue 7 fois dans sa bouche…